Un rapide tour du marché conforte la présidente de la région Poitou-Charentes. Les gens se pressent autour d'elle. "Continuez... C'est bien ce que vous faîtes... On sera avec vous...". L'accueil, dans la salle de la mairie, la galvanise. "Le débat est fracassant comme disait François Mitterrand, c'est une bonne chose, lance à la tribune Mme Royal, en s'adressant aux "citoyens et citoyennes". "La politique n'a que faire des discours 1000 fois rabâchés". Elle défend ses propositions sur la délinquance, - "je suis sur le terrain des socialistes, des gens qui souffrent" -, et insiste sur la différence avec la "faillite" de la droite sur le sujet. La mise sous tutelle des allocations familiales, explique-t-elle, "ce n'est pas la solution de Sarkozy qui fait voter une loi pour les supprimer, c'est vérifier que l'argent sera correctement dépensé pour les enfants".
Sur les établissements à encadrement militaire, "je tiendrais bon", dit-elle, parce que "c'est une alternative à la prison" et qu'"être socialiste, c'est ne pas accepter la fatalité". Son auditoire, relativement âgé, l'applaudit chaleureusement. Mme Royal quitte Orchies un grand sourire aux lèvres. "Je suis habitée, confie-t-elle. La politique, c'est toujours artisanal, il y a une salle, elle vous répond."
A Lille, Pierre Mauroy, président de la communauté d'agglomération, la reçoit gentiment.
"Si Ségolène voulait retirer l'image, ou en tous cas le procès d'intention que l'on fait à la gauche, d'être un peu laxiste sur la sécurité, elle a réussi ! s'amuse-t-il. Et puis elle va droit à l'adversaire et ça aussi, c'est essentiel." Certes, l'ancien premier ministre, concède que l'utilisation du "terme" militaire "fait un peu peur" mais, ajoute-t-il, "les socialistes ont le devoir de rassurer. L'ordre républicain doit s'appliquer dans toute sa sévérité".
Plus tard, au siège de la fédération PS où la soirée s'achève, il s'assoit symboliquement entre Mme Royal et Martine Aubry, la maire de Lille. Mais le climat a changé dans la salle bondée. Mme Aubry, acclamée par ses partisans, met l'accent sur les inégalités. "C'est en portant très haut nos valeurs, sans avoir peur parfois de déplaire que nous gagnerons, comme François Mitterrand qui n'avait pas peur", déclare-t-elle. Sur la sécurité, poursuit Mme Aubry, "la position que nous avons prise depuis des années est la bonne, de la prévention à la sanction". Puis se tournant vers Mme Royal : "Sur la philosophie, je crois que c'est la même, mais on ne peut pas régler le problèmes des jeunes en les mettant dans des centres d'internement militarisés."
Interpellée par des militants jeunes et parfois hostiles, Mme Royal empoigne le micro. "Le débat ne me fait pas peur, lance-t-elle, debout. Alors quoi ? Le mot discipline serait un mot de droite ?" Avec vigueur, elle défend à nouveau sa position. "Depuis quand l'uniforme des militaires, des gendarmes et des pompiers ne serait pas socialiste ?", s'exclame-t-elle. Elle y met tant d'ardeur qu'elle finit par être applaudie - sauf par Mme Aubry.
Isabelle Mandraud